Par Magali Pelletier, consultante en stratégie de produits et accompagnement à l’innovation
Où faut-il mettre nos énergies et nos ressources pour l’année qui s’amorce? Dans cet article, Magali Pelletier, fondatrice de Stratégie MP, spécialisée en accompagnement à l’innovation, développement et stratégie de produits, a recensé pour nous les grandes tendances marketing de l’heure. Voici ce qu’elle en retient.
Que nous réserve 2019 ?
Le nombre de défis toujours plus stimulants, les opportunités de croissance et la vitesse à laquelle se déroulent les activités sont autant de facettes d’une réalité avec lesquelles la majorité des entreprises doit évoluer aujourd’hui et ce, peu importe leur sphère d’activités. Un monde de possibilités qui implique de faire les bons choix et d’investir les ressources intelligemment pour assurer un fleurissement à court terme certes, mais surtout une évolution à long terme ne se limitant pas au profit.
Quelle que soit la mission de votre entreprise, voici un coup d’œil à travers différentes lorgnettes pour explorer cette réalité dans laquelle nous devrons tous évoluer. Cela devra inévitablement être au centre de nos objectifs afin de se coller aux tendances 2019.
L’implication sociale, la compétitivité durable, un environnement de travail stimulant et riche en sens (pour l’attractivité et la rétention des talents) sont autant de composantes avec lesquelles il faudra œuvrer. Qui plus est, le virage décisif vers l’intelligence artificielle qui transforme la vision des relations humaines, du travail et des rôles de chacun en société ainsi que la montée du protectionnisme et la place grandissante de pays comme nouvelles puissances mondiales, viennent altérer nos fonctionnements et stratégies.
Selon le spécialiste Stéphane Mailhiot, vice-président Stratégie chez Havas, lorsque l’on fait référence aux tendances, cela n’a pas tant trait au fait qu’une majorité de consommateurs suivent ce courant, mais bien plutôt à certaines propensions extrêmes. L’augmentation de croissance de quelques points de pourcentage que recherchent les entreprises provient principalement de ces groupes niches qui consomment de façon différente et qui représentent un bon potentiel.
Tendances et courants de surface en marketing
En matière de communication marketing, bien des choses sont déjà en mouvement. Il sera impératif de faire le point à ce niveau pour vos entreprises. Il est temps de monter dans le train et de songer aux meilleures pratiques pour permettre de générer des changements sociaux positifs : un prérequis pour perdurer.
1. L’engagement social et politique des entreprises façonnent les campagnes
Nous sommes à l’ère où l’entreprise, par le biais de ses marques, pose des gestes forts, ambitieux qui mettent de l’avant des valeurs porteuses auxquelles les gens s’associeront davantage. Les entreprises intègrent déjà bien l’aspect social, mais l’on versera de plus en plus vers le politique. Il peut être risqué de prendre position en endossant des valeurs claires, mais cela demeure gagnant si l’on cible bien le message à mettre de l’avant et si l’on est en mesure d’incarner, par des actions continues et cohérentes, ces mêmes valeurs. Cela sera rentabilisé dans un contexte de plus en plus polarisé. Il est entendu que le consommateur recherchera des entreprises posant des gestes sociaux et politiques pour se différencier, puisqu’il deviendra de plus en plus difficile de le faire uniquement par le produit.
Un éventail d’entreprises qui ont su surfer sur cette voie en 2018 démontrent bien cette prise de position.
• La publicité de Nike avec le visage du joueur de la NFL Colin Kaepernick ayant posé le genou sur le sol à l’hymne national pour ensuite être éjecté de la Ligue.
• Patagonia qui a versé 10 millions de dollars au gouvernement, soit l’équivalent des économies réalisées après le retrait de la taxe visant à lutter contre les changements climatiques par le gouvernement Trump.
- Un gazouilli pour en faire foi
- Fin 2017, la marque avait menacé de poursuivre le gouvernement américain en justice après que Donald Trump eut annoncé qu’il réduirait la surface de deux régions protégées de l’Utah. Pour les marques, et lorsque les institutions manquent à l’appel, l’engagement n’est plus un choix mais un devoir.
- Une page du site de Patagonia illustrant cette démarche
• La marque Penningtons réaffirme son engagement pour l’estime personnelle avec le mouvement #sanscompromis visant à combattre les préjugés à l’égard de l’image corporelle des femmes de taille +.
• Adidas mise sur un moyen de distribution exclusif et underground. En vue du lancement de sa chaussure Glitch, on opte pour une approche de communication souterraine. La marque n’hésite plus à aller au-delà de la simple exploration pour gagner des consommateurs hors du spectre publicitaire et médiatique classique. Adidas a travaillé avec les influenceurs ayant joint le projet pour développer une application qui permet aux consommateurs de personnaliser la chaussure qu’ils achètent. Ensuite, seuls les influenceurs ayant participé au projet dès le démarrage ont pu acheter le produit et en parler à leurs « followers ». Et voici l’effet boule de neige escompté. On s’adresse à une population plus nichée.
2. Une redéfinition des codes de marque a lieu
• Un courant de fond anticonsumérisme résulte en une réduction de la présence de la marque
Les marques « sans marque » pour soutenir la distinction. On opte pour une recherche de déconsommation ou encore des consommations plus responsables. On achète moins et mieux, et de meilleure qualité. Dans cette optique, on cherche à éviter des gestes ostentatoires en privilégiant des logos beaucoup moins visibles sur les produits, voire carrément sans marque.
• L’humanité augmentée et les avancées technologiques qui transforment nos approches
À commencer notamment par les assistants virtuels et vocaux (ex. : Alexa, Siri, Google Home) qui bouleversent cette ère. On voit la marque se déplacer d’une approche graphique et visuelle des interfaces vers une marque à l’aspect auditif fort, le « branding sonore » comme choix distinctif au niveau rédactionnel prend son envol. Quelle est la voix de la marque? On cherche à diminuer l’impact visuel et à augmenter l’impact des mots. Comment nommer la marque de la bonne manière pour être référencé correctement dans les algorithmes Google. Il faut que ce soit facile pour le consommateur de verbaliser ce qu’il désire et être rapidement reconnu par la technologie.
• Un marketing moins cliché et de moins en moins genré
On voit des produits cosmétiques apparaitre pour les hommes. Les grandes marques en développent toutes : L’Oréal Men Expert, NUXE, CW Beggs & Sons, Nivea, etc. On voit aussi dans certains pays poindre des lignes de maquillage pour homme.
Mattel a récemment dévoilé sa poupée portant un hijab en hommage à la championne d’escrime Ibtihaj Muhammad, originaire d’Arabie Saoudite.
• La sécurité commerciale, soit l’évaluation et le contrôle de l’écosystème dans lequel se retrouveront les marques
La publicité concernant vos marques devra être située dans un environnement sécuritaire et qui n’endommagera pas l’image d’un produit. On cherche à développer un contenu sécurisé assurant que l’on ne pourra pas porter atteinte à la réputation d’un produit ou de son entreprise. Par exemple, une marque associée à des personnes ou à des situations supportant le mouvement #metoo, qui se retrouverait malencontreusement aux côtés d’un lien vers « Juste pour rire » ou une émission animée par Éric Salvail, serait assez mal perçue. Un autre exemple, la publicité du hijab Nike pour femmes qui se retrouverait dans les médias sociaux à proximité d’une publicité pour un groupe d’incitation à la haine ou au racisme sur Facebook serait dévastateur pour la réputation de l’entreprise.
3. Garder des blancs et des espaces vides en communication pour permettre aux consommateurs de vivre une expérience plus large que le produit à lui seul
On délaisse la surcharge pour épouser davantage le concept qui s’ancre dans l’approche du « wellness », du « slow food », du bien-être, de la méditation, bref d’un retour aux vraies valeurs. On observe dans cette tendance des marques privilégiant une approche minimaliste, qui pourrait même être cataloguée d’ennuyeuse, mais qui se distingue en mettant de l’avant la vraie vie qui peut parfois être tout simplement ordinaire. On les nomme les « zentreprises ». Voici deux exemples différents qui s’intègrent dans cette optique.
• Campagne touristique pour promouvoir le Nebraska
• Ikea –Where life happens
Virtuellement rien d’intéressant, à la limite de l’ennui où l’on propose de passer à autre chose, d’aller à du contenu plus intéressant. À savoir si cette approche s’applique pour tous, fort probablement que non. Mais l’idée d’épurer et de revenir à ce qui est plus « normal » est de mise.
_______________________
* Magali Pelletier, de Stratégie MP est consultante, stratège et formatrice en gestion d’entreprises innovantes. Elle compte plus de 15 ans en gestion stratégique marketing et développement de produits et a œuvré au sein de plusieurs entreprises actives au niveau international. Elle collabore avec l’IDP depuis maintenant cinq ans comme partenaire consultante et formatrice dans le cadre de la formation « Être chef de produits ».
Références :
– https://www.infopresse.com/article/2018/10/26/tendances-marketing-a-quoi-doit-on-s-attendre-pour-2019
– https://ici.radio-canada.ca/premiere/emissions/medium-large/segments/chronique/100620/betes-pub-tendances-publicitaires-2019-granata-mailhiot
– https://lareclame.fr/tendances-creation-pub-193390
– https://www.spredfast.com/social-marketing-blog/why-brands-cant-stay-silent-about-politics-2018
– https://www.ladn.eu/mondes-creatifs/top-des-pubs/publicite-quelles-tendances-creatives-pour-2018/
– https://www.ladn.eu/nouveaux-usages/etude-marketing/etude-les-tendances-marketing-de-2018-de-kantar-media/
Comments are closed.